nous avons tout eu : le brouillard, les nuées menaçantes, l’obscurité inquiétante, les éclairs mêmes, bref, tout de nature à mettre en pièces notre mode de vie et notre capacité d’envisager l’avenir. Fin 2020 pourtant, très progressivement la lumière commença de revenir au gré des progrès en matière de thérapies contre le Covid-19 et de la diffusion des vaccins destinés à la prévenir, encore que tout le processus eût été marqué par un invraisemblable pataugeage en termes d’organisation. Que ce soit aux niveaux des Nations Unies, de l’OMS, il est vrai ébranlé par les attaques et lâchages du grand blond, de la Communauté Européenne ou des gouvernements de la planète, la réaction à la pandémie et la lutte contre celle-ci furent lamentables, témoignant d’une désorganisation, d’une absence de perspective et de simple bon sens . Espérons qu’à force de farfouiller dans les planètes, on n’y découvre pas une civilisation, aux représentants aux yeux en amande exophtalmiques ou caractérisés par des tentacules humides et inquisiteurs, malintentionnée à l’égard de notre pauvre Terre, engoncée dans ses contradictions ! La prise de conscience serait pitoyable, chaque nation étant victime de son égoïsme et de son étroitesse d’esprit.
Mais revenons à nos moutons terrestres ; on s’attendait à une reprise économique en U, elle ressemblera plutôt à un V, comme vaccin. Le frémissement de l’inflation observée un peu partout est un bon signe : le tassement momentané de la production de biens face à une demande en augmentation. On peut donc légitimement s’attendre à un net rebond des bénéfices d’entreprises étouffées par le virus, et au soutien qu’apporteront, en Europe par exemple, les incitations budgétaires et les injections de liquidités des banques centrales. Beaucoup de firmes ont profité des circonstances pour réduire leurs coûts et améliorer leur efficacité opérationnelle ; le plan de relance de 750 milliards d’euros annoncé en juillet 2020 et voté à la fin de l’année a témoigné de la cohésion des dirigeants européens. L’accent sera mis sur le changement climatique, la technologie ainsi que la santé. La zone euro va retrouver son rôle d’arbitre entre les Etats-Unis et la Chine. Nous allons progressivement revenir à un climat plus paisible après quatre années d’agitation stérile.
Des rayons transparaissent des nuages ; outre les grands indicateurs économiques en notable progression, on observe aussi des phénomènes ponctuels mais révélateurs : Accor par exemple dont plus de 80% des hôtels ont rouvert, EMC et d’autres compagnies qui ont repris leurs croisières ou les actions de Dufry ou de l’Aéroport de Zurich qui se sont brusquement réveillées, sans évoquer les compagnies de transport aérien, probablement des mois avant que le trafic-voyageurs ne redémarre sensiblement. Il convient à cet égard de se souvenir de l’incroyable capacité d’’anticipation de la Bourse qui décèle les perspectives des marchés bien avant les analystes fondamentaux. Pour l’heure on constate que la reprise marquée est en grande partie le fait de la Chine dont le réveil est précurseur de mouvements d’amplitude mondiale. Le luxe, encore lui, y a démarré en fanfare, favorisé par la période de fêtes ainsi que les restrictions de voyages favorisant la propension à acheter sur place. A titre anecdotique, mentionnons que lors de son premier jour de réouverture à Canton, le magasin d’Hermès a connu un mouvement d’affaires de près de 3 millions d’euros. Les demandes d’infrastructure se sont pas en reste et requièrent la collaboration de grandes entreprises allemandes et françaises dans le domaine de la digitisation et de l’automation. Autre signe qui nous concerne directement en Suisse, l’affaiblissement relatif de notre monnaie par rapport à l’euro, le dollar et même la Livre sterling, ce qui témoigne d’une moindre recherche de sécurité, qui, en l’occurrence, est favorable pour nos exportations. En passant, notons que l’amélioration de la devise anglaise est peut-être le signe d’une reprise en main de la Grande-Bretagne après la déconfiture du Brexit. Dans notre pays, on s’attend aussi à un rebond au cours du deuxième trimestre qui devrait se prolonger par la suite, avec une croissance de plus de 2% au cours de l’année prochaine.
Le monde aura connu une année et demie de congélation progressive des esprits et des affaires ; la banquise se disloque enfin. Il était temps.
Soit dit en passant : dans le carnet des potins mondains, signalons que le Prince français Kering a voulu se pencher sur la princesse helvético-sud-africaine, Richemont, assoupie et léthargique depuis de nombreuses années, dans l’espoir de la réveiller, sans grand succès, D’aucuns, même en Suisse, ne la connaissent pas et la confondent parfois avec un hôtel de Genève qui a eu son heure de gloire avant de tristement sombrer. Rappelons que la belle endormie bénéficie d’une dot prestigieuse, avec parmi ses joyaux : Cartier, Piaget, Montblanc , Van Cleef & Arpels, Vacherin-Constantin ou Baume&Mercier pour n’en citer que quelques-uns parmi une vingtaine. Sa capitalisation est presque quatre fois celle de Swatch ou une fois et demie celle du Crédit Suisse. Il y aura bien un jour un autre prétendant plus séduisant et convaincant, à moins que la princesse ne jette elle-même son dévolu sur un autre noble, friand de convoler.