Et ouf, on respire, et ouf ça va mieux ; et ouf, on s’en tire, on peut remercier le bon Dieu ! – Février 2021

(Chanson de G.Guétary 1915-1997)

Ouf, le 20 janvier est enfin passé : le grand blond est retourné en Floride, avec sa cohorte de blondes, elles-aussi, non sans nous avoir créé des sueurs froides, avec l’invasion ignominieuse du Capitole par ses hordes de nazillons dépenaillés, et l’angoisse qu’il veuille marquer la fin de son règne du sceau d’un feu d’artifice nucléaire. Nancy Pelosi l’avait bien redouté en prenant contact avec l’Etat-major des armées afin de tuer dans l’œuf toute ultime velléité d’embraser la planète. A noter que l’intéressé quitte la scène avec les plus mauvais sondages depuis l’époque de H.Truman.

Il appartient maintenant au brave J.Biden et à son équipe de ramasser les bris de verre et de rafistoler un édifice mis à mal par 4 ans d’incongruités, dont la négation obstinée de s’attaquer au Covid-19. Au flamboyant pyromane succède un homme du sérail, fin connaisseur de l’administration et de toutes ses tendances politiques, immense atout dans le monde convulsé qu’il devra affronter. Il pourra néanmoins bénéficier de l’appui du Sénat à majorité démocrate si l’on tient compte de la voix déterminante de la vice-présidente élue, Kamala Harris, lui permettant d’augmenter aisément le plan de soutien budgétaire à l’économie en recourant à encore plus d’emprunts, ce qui explique la hausse des taux à 10 ans. Les Gafam seront confrontés à plus de réglementation, ce qui en soi n’est pas un grand mal, alors que les pharmaceutiques pourront souffrir d’une pression sur le prix des médicaments.

Quatre immenses chantiers attendent le nouveau président : remettre en forme le tissu social mis en lambeaux par son prédécesseur, s’attaquer réellement au Covid-19, renouer un dialogue constructif avec la Chine, et s’attaquer aux questions climatiques. 

Si l’on veut comprendre le déchirement du tissu social américain, il faut se souvenir que la mentalité des USA est totalement différente de l’européenne. Il existe dans le pays une défiance viscérale à l’égard du pouvoir central. Tout ce qui provient de Washington est d’emblée suspect, et les valeurs sont différentes. Les faillites successives de l’ancien locataire de la Maison Blanche sont interprétées comme autant de capacité à rebondir ; le fait qu’il soit parvenu à échapper à l’impôt est le signe d’une astuce admirée ; sa grossièreté à l’égard des femmes correspond à une vassalité courante au centre des Etats-Unis. Son refus de considérer la gravité de la pandémie est une manifestation stupide de supériorité physique  d’un autre âge ; dans un pays où l’on peut recourir facilement à l’armée et ses talents, la vaccination à une grande échelle devrait être une simple formalité. Recréer un tissu social ne passe pas seulement par une distribution de chèques selon la méthode dite de l’hélicoptère bien que M.Biden soit conscient qu’il y a urgence et qu’il prévoit un plan de 1’000 milliards de dollars d’aides directes aux ménages, 440 milliards de soutien aux petites entreprises et aux municipalités et 415 pour lutter contre le Covid-19. Les Américains percevront des chèques de 1400 $, davantage que les 600 versés dans le premier plan de relance. L’allocation de chômage sera portée à 400$ par semaine contre 300 actuellement. Le salaire minimum  devra être augmenté à 15$ par heure contre 7.25 actuellement. Des crédits budgétaires conséquents seront prévus pour la lutte contre le réchauffement climatique. Tout ceci devrait conduire à une reprise de l’économie et à plus d’inflation, avec en contrepartie une augmentation du taux d’impôt des sociétés qui augmenterait de 22% à 28% pendant son mandat, bien en deçà des 35% qui était la norme avant l’arrivée de M.Trump. Le nouveau président devra s’atteler à  redonner aussi de la confiance à une population dans son destin et sa capacité à surmonter les épreuves physiques grâce à un système de santé efficace, dans l’esprit du système du président Obama, mis en pièces par son successeur ! il n’est pas normal de devoir se retrouver à la rue pour des raisons de santé, mais là aussi il y a une question de mentalité, et cette triste éventualité ne révolte pas systématiquement les Américains  nantis.

Renouer avec la Chine est d’une évidence flagrante. Qu’on le veuille ou non, l’Empire du Milieu est  la grande puissance d’aujourd’hui et de demain. La seule façon de la contrôler consiste à créer autant de liens que possible avec elle, une manière élégante et efficace de la contenir et de la rendre dépendante. Il y a des myriades d’entreprises américaines qui ont déjà des usines en Chine, qui y font travailler des centaines de milliers de personnes ; on ne peut pas le nier. Si les Etats-Unis se sont laisser envahir par des produits chinois, la responsabilité n’en incombe pas aux Chinois, mais bien aux Américains assoiffés de produits bon-marché et pas toujours indispensables, loin de là.  D’ailleurs, la Chine s’en est finalement bien tirée de la pandémie qu’elle a probablement provoquée ; elle est un acteur incontournable et l’élément central dans le développement de la région, encore plus, depuis qu’elle a créé avec 14 autres pays asiatiques le plus grand accord de libre échange mondial, couvrant près d’un tiers de la population mondiale et représentant près de 30% du PIB de la planète.

S’attaquer aux questions climatiques est d’une urgence absolue. Il est aberrant d’avoir pu voir un soi-disant leader assister sans broncher, des semaines, des mois durant, à des incendies ravageant le Californie ; il n’est pas exclu que mesquinement, il ait pu se réjouir des malheurs frappant un Etat traditionnellement démocrate ! Il faut de toute urgence reboiser, recréer des réservoirs, sauver les restants de faune, arrêter la construction de pipelines détruisant des régions entières, alors qu’on ne sait plus que faire avec une surproduction de pétrole.

Le président Biden a marqué un très grand point en ciselant la structure de son entourage politique et en choisissant des gens de qualité à l’expérience éprouvée, au détriment de commanditaires généreux comme son prédécesseur. Souhaitons-lui bonne chance ; son pays, l’Europe, le monde entier en ont grand besoin. Notre planète est trop exigüe pour avoir laissé un trublion mal-inspiré et haineux la détruire irrémédiablement, sans compter que ce retour à des visions plus saines aura des conséquences positives sur l’économie, qui en principe devrait se concrétiser à la sortie de l’hiver, vraisemblablement en avril ; Christine Lagarde l’a bien annoncé : «  Nos prévisions sont fondées sur des mesures de confinement jusqu’à la fin du premier trimestre ». Il  y a effectivement des raisons d’espérer : le quatrième trimestre de 2020 a été solide pour nombre d’entreprises, de sorte qu’elles attaquent 2021 dans des conditions meilleures que prévues. Il ne faut pas trop s’inquiéter d’une légère remontée de l’inflation et des raidissements des taux ; dans ce domaine, la marge est grande ; on est fréquemment en dessous de zéro !