US dollar for ever or never more – Mars 2018

Tous les deux ou trois ans, un commentateur financier entreprend de recourir à l’image afin de représenter la dette américaine.

Par commodité, comme unité de volume, il utilise le billet de cent dollars, la coupure la plus connue, ne serait-ce qu’en tant que trame d’échanges dans nombre de films policiers américains.

Au fil du temps, on a représenté cette dette, successivement par le volume d’une maison, d’un immeuble, voire d’une tour. Avec près de 20 trillions, la dette exprimée en billets de 100 dollars, correspond aujourd’hui au cubage de deux fois les tours jumelles détruites par les attentats du 9 septembre 2001, soit quatre tours ; autant dire qu’il s’agit d’un chiffre intersidéral, monstrueux électron, qui ne peut que gonfler inconsidérément avant le cataclysme.

Depuis 1970, avec l’abandon de la couverture-or du dollar par le président R.Nixon et son remplacement par une pirouette selon laquelle le dollar serait aussi sûr et valable que le métal précieux, le doute s’est insidieusement distillé dans les esprits, à telle enseigne que par rapport à notre monnaie, la parité s’est effondrée de plus de 4 francs à moins d’un franc.

Les mises en garde, parfois chauvines, n’ont pas manqué : le Général de Gaulle par principe, qui ne tolérait pas l’hégémonie américaine sous toutes ses formes et ne manquait pas de critiquer cet impérialisme monétaire en proposant le retour à l’étalon-or.

Mais, l’action la plus spectaculaire de remise en cause du dollar, par ses répercussions politiques, au gré d’un incident mêlant le complot, l’indécence, le courtelinesque et la vénalité, a bien été celle de Dominique Strauss Kahn.

Le 10 février 2011, deux mois avant l’incident du Sofitel de New-York, le patron du FMI, devant un parterre de journalistes, en appelait en effet à un redimensionnement du poids du dollar au profit des droits de tirage spéciaux, mettant en exergue l’euro, la Livre sterling et surtout le Yuan. Il demandait aussi avec insistance un audit des réserves d’or américaines, le dernier contrôle remontant à plus de dix ans. Cette prise de position était proprement inacceptable pour les USA.

En se remémorant ces faits, on comprend peut-être mieux la complaisance des medias d’Outre-Atlantique à souligner l’aspect sordide de l’affaire de Nafissatou Diallo, qui entre parenthèses, a bénéficié d’une compensation d’un million et demi de dollars, de quoi donner des idées à toutes les personnes qui, depuis quelques mois se plaignent d’harcèlements remontant parfois à plus de 20 ans !

Cette manifestation de vengeance a certainement eu aussi l’aval d’un ou de plusieurs candidats à la présidence de la France, DSK ayant été jusque-là, considéré comme le candidat le mieux placé dans la joute.

Depuis, la remise en cause du dollar n’a pas cessé, mais gagné en ampleur ; maintenant, il ne s’agit plus des commentaires d’un responsable ignominieusement contraint de quitter son hôtel par une porte dérobée pour faire face soudainement à des dizaines de caméras installées par hasard, mais de lames de fond au niveau gouvernemental de plusieurs pays, et ce ne sont pas les prises de position contradictoires du Président américain en opposition avec son Secrétaire du Trésor qui pourraient calmer le jeu. Le comportement de l’exécutif américain est d’ailleurs totalement surréaliste : réduire drastiquement la charge fiscale d’une minorité de privés et d’entreprises (de 35 à 21%) tout en voulant se lancer dans des travaux d’infrastructure gigantesques ! Qui va payer ou plutôt qui va continuer d’imprimer de la monnaie sans discernement ? Le grand acteur politique qu’est la Chine a déjà averti Ryad qu’elle sans forcerait les Saoudiens à accepter le yuan en payement du pétrole acheté.

La Russie n’est pas en reste ; elle a aussi intégré le yuan dans ses réserves officielles. En août 2015, les cambistes et les compagnies russes ont acheté un nombre record de 18 milliards de yuans soit environ 3 milliards de dollars. Le Brésil et d’autres pays, lassés de devoir acheter de la dette du Trésor américain, sont à la recherche d’autres devises ou réserves. La Russie, toujours elle, a triplé son stock d’or de 600 à 1’800 tonnes, ce qui pour elle est son arme la plus agressive.

La première ligne de défense consiste en effet à acquérir de l’or physique qui ne peut pas être gelé hors du système de payement international ou piraté .Avec de l’or, on peut toujours payer un autre pays en mettant le métal précieux dans un avion.

Beaucoup de pays ne veulent plus aussi dépendre uniquement du Swift dont ils risquent d’être exclus. La Russie conjointement avec la Chine élaborent un système de transactions, excluant le dollar américain et cherchant à développer la technologie blockchain, entièrement chiffrée, peu coûteuse et ne dépendant ni des banques occidentales, ni du Swift ni du dollar.

Et dans la pratique, que faire si on détient des dollars ?

En tout cas, éviter comme la peste les obligations et les placements à court terme dans cette monnaie en dépit de taux en reprise. Favoriser en désespoir de cause, les actions américaines de très grande qualité : « les Aristocrates », qui payent un bon dividende depuis au moins 20 ans, et encore et toujours, de l’or.

On n’est pas au bout de nos surprises, ni avec les USA ni de surcroît, avec leur président en fonction.