Business en chambre – Mars 2017

Les débuts d’année sont l’occasion de faire le point sur l’état de l’économie, notamment sur le climat prévalant durant la période des fêtes. Fin 2016 n’a pas échappé à la règle et fit l’objet d’analyses fouillées concluant à un tassement…

Les débuts d’année sont l’occasion de faire le point sur l’état de l’économie, notamment sur le climat prévalant durant la période des fêtes. Fin 2016 n’a pas échappé à la règle et fit l’objet d’analyses fouillées concluant à un tassement des affaires, particulièrement dans les régions frontalières, mais aussi et surtout en raison des achats en ligne.

On ne s’en souvient pas toujours, mais la mode d’acheter par le truchement d’Internet s’est incroyablement développée à partir du 11 septembre 2001. Consciemment ou non, des acheteurs angoissés ont décidé qu’il ne valait plus la peine de sortir de chez soi pour acquérir un bien courant dont ils connaissaient déjà toutes les caractéristiques.

Cette anxiété s’est graduellement insinuée dans les esprits de beaucoup de consommateurs qui ont opéré une sélection dans leurs achats : le bas de gamme, les articles de valeur moyenne et le luxe.

Les deux extrêmes échappent à la spirale informatique : il n’est pas évident d’acheter en ligne un kilo de citrons, et à l’opposé, il est difficile d’imaginer qu’une dame acquiert un sac Hermès Birkin ou une broche Cartier valant plusieurs dizaines de milliers de francs sans les avoir vus, palpés, voire portés au bras ou essayés sur elle.

En revanche, la gamme intermédiaire des produits de valeur moyenne peut sans autre être acquise par ordinateur.

Cette évolution s’est traduite par l’envolée des cours boursiers des entreprises de transport ou de ventes par correspondance, comme Fedex, Amazon ou Alibaba pour n’en citer que quelques-unes, et qui sont devenues les acteurs incontournables du commerce en ligne et de la livraison rapide des produits achetés.

Ce qui précède traduit un chargement extrêmement profond de notre société qui paradoxalement se replie sur elle-même alors que les gens vont de plus en plus loin pour leurs vacances d’où ils rapportent étrangement des articles qu’ils trouveraient à l’échoppe de leur coin de rue !

En extrapolant, on observe que l’Uberisation des mœurs va encore plus loin : des « bobos » ne veulent plus entendre parler d’hôtels et préfèrent les chambres d’hôtes, pas forcément bon marché et au service réduit, voire inexistant. Des maîtresses de maison, tant soit peu talentueuses, s’improvisent cuisinières professionnelles et louent les terrasses de leur immeuble afin d’accueillir contre payement des hôtes inconnus. Des coiffeuses, des manucures, abandonnent leur salon et se rendent à domicile ; des bricoleurs plus ou moins ingénieux se substituent aux corps de métiers classiques, des médecins mêmes se voient remplacés par des rebouteux, sans parler des gourous financiers qui promettent monts et merveilles, à grand renfort de graphiques virtuels, faisant ainsi courir des risques insensés à leurs malheureux clients.

Partout, des magasins ferment ou se virtualisent, l’acheteur ayant pris l’habitude de comparer les prix « classiques » aux conditions trouvées sur Internet. Des structures éprouvées se disloquent en faveur d’échafaudages brinquebalants ; une Société nouvelle se met en place en recourant à des béquilles aléatoires comme les IPhone qui se transforment en guide routier, gastronomique ou boursier, font office de traducteur et de dictionnaire, analysent des problèmes de santé, mesurent les calories, élaborent des diagnostics, préconisent des régimes ou recommandent les destinations de vacances à la mode.

Le phénomène est-il irréversible ? Pas certain ! Même le géant Alibaba cherche depuis peu à nouer des contacts avec des chaînes de distribution traditionnelles.

Il est fort à parier que d’ici quelques années, le constat sera plus nuancé. Espérons-le, car le Monde d’Orwell nous guette !