Ça y-est, Monsieur Donald Trump et sa cohorte de ministres milliardaires, plus quelques millionnaires à la traîne, est devenu Président des Etats-Unis avec 46% d’opinions favorables !
L’ère des universitaires brillants, parfois trop angéliques, est révolue et remplacée par des impulsifs primaires. Il est fort à parier que le ton de la campagne présidentielle, bien qu’atténué, animera les quatre ans à venir et que nous allons radicalement changer de paradigme avec une société plus divisée que jamais, et qui subira les séquelles des diatribes injurieuses d’origine. On remettra en cause des compromis atteints de haute lutte comme la protection de l’environnement, le renoncement progressif à l’atome, l’énergie renouvelable, la limitation de la production d’armes chimiques, la recherche spatiale, la facilitation des échanges commerciaux ou encore une protection médicale basique.
Or, à la longue, les marchés ne fonctionnent qu’avec un minimum de continuité, de coopération et d’homogénéité au sein des populations. Les Etats-Unis vont payer un lourd tribut à la volonté maintes fois réitérée de stigmatiser une partie de la population, y compris les innombrables sans-papiers qui, entre parenthèses, ont souvent édifié les tours du nouveau Président, et cela est d’autant plus paradoxal, qu’en dehors des Indiens natifs, progressivement décimés par les armes, l’alcool ou les maladies, les Américains sont tous des immigrés, y-compris les passagers du May-Flower qui se targuent de la noblesse de leur origine.
Le Président a joué sur la corde malsaine des sentiments primitifs en accusant par exemple l’étranger et la globalisation, de la disparition de centaines de milliers d’emplois alors qu’ils sont surtout imputables à l’automatisation. Sa rhétorique simpliste sur la Chine, le Mexique ou le NAFTA ne repose pas sur des faits objectifs, mais sur des sentiments ou plutôt des ressentiments. Il a ainsi créé un amalgame de victimisation et d’esprit revanchard, infiniment pernicieux à la longue.
M.Trump a deux obsessions politiques reconnues. Une louable, mais risquée dans les compromis qu’elle implique, l’anéantissement de l’Etat Islamique, avec comme conséquence un rapprochement avec la Russie, en soi souhaitable, mais aussi avec la Turquie et la Syrie, au détriment des pays du Golf, et une deuxième qui consisterait à diminuer le rôle grandissant de la Chine et à pénaliser globalement la production des sociétés américaines à l’étranger, notamment et surtout au Mexique.
Or, chaque fois que les Américains ont voulu jouer la carte du protectionnisme à tout crin, ils ont créé une profonde récession touchant, tant l’agriculture dans les années 20, que l’industrie dix ans plus tard. En l’occurrence, cela tombe d’autant plus mal que 2017 sera une année d’élections dans plusieurs pays européens où l’on craint légitimement une forte poussée de la droite populiste, repliée sur elle-même, avec sa population craintive et vieillissante, et sa détermination de créer de nouvelles entraves au commerce international.
Se trouveront ainsi réunis tous les ingrédients d’une forte inflation avec un rétrécissement de la production, face à des prix et des salaires qui augmentent, ce qui ne manquera pas d’indisposer les créanciers historiques des Américains que sont la Chine et, depuis peu le Japon. Au sein du Congrès républicain, Monsieur Trump ne compte certes pas que des amis ; il l’a cruellement ressenti lors de sa campagne, et il n’est pas exclu que cette opposition pérenne dépassât le stade des escarmouches. Quant à la presse, elle est férocement et définitivement divisée à son sujet. Le milieu artistique, de son côté, lui est totalement hostile.
Comme avant toute situation conflictuelle sérieuse, la dette publique va exploser et échapper à tout contrôle ; le Président a d’ailleurs ingénument admis qu’une faillite de son pays ne serait pas catastrophique ; cette transposition des expériences privées à la conduite d’un pays est terrifiante, et ses conséquences également.
Après tous ces dégâts, il se trouvera bien un lobby de la dernière chance qui prendra les choses en mains, en adoptant des mesures chirurgicales, décrites récemment avec brio par un professeur de l’Université de Genève : notamment un écrémage des dépôts de non-résidents ; la dette se trouverait ainsi colmatée en catastrophe, et les investisseurs étrangers qui auraient innocemment pensé trouver en Amérique un havre de paix fiscale, n’auront plus que les yeux pour pleurer, sans espoir de trouver une échappatoire accueillante !
En attendant, à quelques jours de son intronisation officielle, Monsieur Trump s’en est déjà pris à l’Europe, surtout à Madame Merkel, à l’Otan, à des élus de son propre pays, aux constructeurs automobiles ainsi qu’à une partie de l’armée.
Quatre années difficiles nous attendent ; des tweets quotidiens ne sont pas la panacée !