Aux Etats-Unis, les dés sont jetés. Les injures, vociférations, obscénités mêmes, menaces et troubles du comportement ont pris le dessus sur la raison. L’orangé, secondé par son Sganarelle bionique, s’apprête à brinquebaler le paysage politique de son pays, en assumant sa vengeance à l’égard de ceux qui ont osé envisager des poursuites judiciaires à son endroit en remodelant l’administration et la justice pour de longues années, sans oublier l’armée dont d’anciens représentants ont eu l’audace d’émettre des réserves sur son comportement de meneur, recourant à des rapprochements historiques qui n’ont pas eu l’heur de lui plaire.
L’attelage avec le nouveau propriétaire de X est terriblement dangereux ; les attitudes inconséquentes de la NASA par exemple en recourant à la collaboration de telle ou telle de ses entreprises dans le domaine spatial, ont déjà permis à l’intéressé d’avoir accès à des secrets défense réservés en principe à quelques haut gradés de l’armée. Lorsqu’on évoque les entretiens qu’il aurait eus ou maintiendrait encore avec le locataire du Kremlin, on ne peut qu’en frémir ; cette synergie maléfique remet en cause l’indépendance stratégique des USA et celle de ses alliés. D’autre part, fournir à la demande d’un politicien versatile, des instruments d’une haute technologie, ne peut aboutir qu’à des résultats désastreux.
Ceux qui ont eu récemment des contacts outre-Atlantique aboutissent au même constat : la société civile s’est fracturée à telle enseigne que des centaines de milliers d’Américains envisagent de déménager vers une autre région du pays, même à l’étranger, les divergences d’opinion rendant problématique une coexistence normale. Il faut d’ailleurs garder aussi en mémoire que dans les projets immédiats du nouvel exécutif figure la volonté de renvoyer manu-militari, dans leurs pays d’origine, des hordes entières d’immigrés, y compris ceux qui exercent un emploi utile à la société, politique d’autant plus paradoxale que le nouveau président est descendant d’émigrés, sans parler des origines de ses épouses successives. Le locataire du Kremlin n’a pas attendu le résultat des élections américaines pour marquer son territoire, en convoquant un sommet des Brics auquel se sont ralliés une dizaine de nations disparates, avec un dénominateur commun, celui de se distancer encore davantage des Etats-Unis et, parallèlement ou ultérieurement de sa monnaie.
Ne nous voilons pas la face : tous les traités, toutes les conventions, y compris sur l’environnement qui va terriblement pâtir, tous les accommodements relevant de l’international vont être revus sous prétexte d’une relecture au pas de charge de la Doctrine Monroe, à savoir un repli sur soi. L’Europe devra réexaminer rapidement sa copie, mettre sous le boisseau ses querelles villageoises au profit d’une politique commune et solide. Elle devra reprendre seule le flambeau de l’Ukraine et y consentir de gros sacrifices financiers, voire humains. L’orangé aura beau dire qu’il s’agit d’un problème du vieux continent, et il n’aura pas totalement tort, si la Communauté européenne n’empoigne pas seule le problème, elle pourra assister rapidement à une réécriture de ses frontières de l’Est ; de même pour l’Otan avec lequel l’Amérique prendra ses distances. Il faut dire que celle-ci sera prochainement concernée, elle seule, par un nouveau front infiniment plus complexe en Extrême-Orient, celui de Taiwan.
Il n’y a guère que dans le Levant où les deux continents conserveront une politique de soutien commune dans la résistance à l’Islamisme radical. Une Amérique va progressivement nous quitter, une Europe stratégique doit naître. Si elle manque à cet appel, elle subira un monde dominé par des blocs de puissance qui n’ont qu’une seule règle dans les relations entre Etats, le rapport de force.
Il y a quelques dizaines d’années, un banquier suisse avait commis, avec fracas, un article qui lui fut fatal « Goodbye America », suite à une nouvelle réglementation contraignante pour l’époque, en provenance des Etats-Unis. Poursuivi, recherché, menacé, il finit par mettre un terme à son activité. Cependant, et c’est un vent d’espoir, les temps ont bien changé : de grandes, des entreprises américaines sont devenues gigantesques, mondiales, apolitiques et faisant montre, selon l’expression à la mode, de résilience. Il n’y a guère que le Sganarelle bionique qui cherche, par opportunité ponctuelle, à vouloir imprimer une image politique à ses entreprises, mais cela ne saurait lui survivre à plus long terme.
Soit dit en passant : les Apple, Microsoft, Eli Lilly, Meta, etc. conserveront leur attrait et leur indépendance dans la durée, quelles que soient les imprécations du moment. Ces vociférations, elles vont nous accompagner pendant 4 longues années ; on commence à s’y faire. Ce qui en revanche est beaucoup plus inquiétant, c’est la présence du Sganarelle bionique qui peut surgir inopinément d’une anfractuosité du tunnel. Aussi longtemps qu’il limite ses ambitions à vouloir planter de la scarole sur la planète Mars, on peut s’en accommoder ; si en revanche, son mentor lui suggère d’affiner des méthodes, dans le domaine de l’identification des personnes ou leur recherche par exemple, cela devient beaucoup plus périlleux, d’autant plus qu’il vient d’être nommé en tant que ministre de « l’efficacité gouvernementale ».
Un tunnel, long de 4 années, nous attend. On ne peut s’y engager qu’avec circonspection, mais aussi avec détermination. Il y a effectivement de pâles lueurs d’espoir. Évoquant le Far-West, un chroniqueur avait prédit : il ne peut y avoir deux sheriffs dans une ville ; de là à extrapoler que prochainement l’attelage des deux caractériels se disloque, on se surprend à rêver, d’autant plus que d’ici deux ans, la moitié de la chambre des représentants devra être renouvelée ! « God bless Europe ! ».