À plusieurs reprises, dans le cadre de nos chroniques, nous avons mis en exergue nos secteurs de prédilection, à savoir l’alimentation en général, la pharmacie et, « last but not least », celui du luxe.
Il faut se rendre à l’évidence : contre toute attente, depuis plusieurs mois, les valeurs alimentaires sont plus que décevantes, en dépit du rendement de leurs titres, souvent attrayant. Quelques représentantes de la pharmacie s’occupant de régimes amincissants ont eu davantage de succès. Le luxe homogènement a bien tiré son épingle du jeu, ce qui nous conduit à nous concentrer sur l’une de ses plus brillantes représentantes : Hermès.
L’entreprise fut créée en 1837 dans un atelier de harnais sous la conduite de Thierry Hermès qui, d’emblée, visa l’excellence dans sa production de selles et d’accessoires dont la finition et la robustesse attira l’attention de la clientèle des royautés européennes de l’époque et lui valut une distinction convoitée lors de l’Exposition universelle d’art et d’industrie à Paris.
Dans l’entre-deux-guerres, le mode de vie évolua et Hermès étendit sa gamme de produits à la maroquinerie, avec une fantastique innovation inspirée de la capote d’une voiture militaire canadienne dont le système d’ouverture et de fermeture connu sous le nom de fermeture Eclair sera appliqué aux bagages de la Maison.
Au gré des décennies de nouveaux métiers sont adoptés, des vêtements masculins, de golf notamment, puis des bijoux, des montres et des sandales, des parfums aussi avec une date à se remémorer, 1937, le premier carré de soie « Jeu des omnibus et dames blanches ».
La Maison Hermès s’est toujours distinguée des autres sociétés de luxe de plusieurs manières ; la qualité exceptionnelle de ses produits, souvent fabriqués à la main par des artisans hautement qualifiés, d’où une durabilité et une valeur de revente élevée. Cette obsession de la qualité et le souci d’assurer une relève amena à la création d’écoles Hermès formant des artisans de haut vol dont le certificat de fin de parcours est en soi une référence d’excellence. L’innovation n’est pas en reste et, tous produits confondus, ce ne sont pas moins de 16’000 articles qui sont testés et mis sur le marché annuellement.
Hermès cultive une image de discrétion et d’exclusivité, en limitant la distribution et en évitant un marketing agressif. Cela renforce l’attrait de la marque et crée un sentiment de rareté et d’élitisme de bon ton autour de ses produits. La société n’a pas d’égérie ni d’ambassadeur, mais doit éprouver une satisfaction discrète lorsqu’une personnalité de l’art ou de la politique arbore une forme ou l’autre de la marque.
Ce souci légendaire de la discrétion fut provisoirement rompu à bon escient en juin 1993 lorsque la marque fut introduite sur le second marché de Paris, sous la forme d’une offre publique de vente qui rencontra un immense succès, la demande étant plus de 30 fois supérieure à l’offre, portant sur plus de 14 millions de titres au prix d’offre de 300 francs (équivalent de 45 Euros environ !) contre une offre de 425 mille titres. 2. 93% des demandes, en majeure partie en provenance de l’étranger, purent être ainsi servies.
Une trentaine d’années plus tard, l’action s’échange aux alentours de 2300 Euros, avec un dividende revu régulièrement à la hausse en fonction de l’évolution des résultats. Cela représente, compte tenu d’une division ultérieure des titres par deux, une progression de plus de 45’000 % !!! par rapport à moins de 4’000%, ce qui n’est déjà pas mal, pour le fonds Berkshire Hathaway de Warren Buffett au cours de la même période.
La conclusion corrobore la philosophie de notre précédente chronique consacrée à Thomas Gayner et à sa politique. Lorsqu’on a un bon cheval, on fait fi des incidents de parcours et on s’en tient à sa décision initiale. Hermès fait partie de cette poignée de valeurs comme Air Liquide, ASML ou Microsoft, deux ou trois autres encore, que l’on n’aliène jamais.